lundi 23 novembre 2015

Lettre à Michel Onfray


Cher Michel,
votre contre-histoire de la philosophie est le fruit de la pensée d'un philosophe conscient que les platoniciens ou aristotéliciens ont fait main-basse sur les écoles, collèges, lycées et universités au détriment des penseurs [ tels et telles ] Leucippe, Démocrite, Épicure, Ésope, Lucrèce, Émilie du Châtelet, Olympe de Gouges, Nietzsche, Albert Camus, Élisabeth Badinter... – une démarche que j'approuve, si je puis dire, à 500 % - qu'il m'arrive souvent d'y faire référence ou encore parfois de reprendre à mon compte
À cet instant peut-être accepterez-vous que je consacre quelque lignes à me présenter : je suis plutôt satisfait de n'être entré dans des lieux de cultes que pour en apprécier exclusivement l'urbanisme, l'architecture marquant bon nombre de paysages urbains ou ruraux, mais aussi pour y goûter l'atmosphère sonore des concerts de musiques profanes ou « sacrées » au même titre que je me rends exactement pour les même raisons dans les enceintes magiques des théâtres antiques ou autres enceintes édifiées dans l'antiquité un peu partout dans le monde
Vous l'aurez compris, je suis athée, je déteste toutes formes d'endoctrinements dans la religion - amoureux des Arts, peut-être par dessus tout lyricomane grâce à Mozart ( le musicien qui aimait vraiment les femmes ) – [ aussi ] un plus que passionné par les sciences et par les femmes ( enfin... pas toutes ) ... - voilà pour '' le principal ''
Cependant force m'est d'observer que vous êtes le produit d'une éducation par la religion vécue dans votre enfance ce qui, ce n'est pas vraiment de votre faute, ne fait pas de vous un athée et un anti-sexiste à part entière – pour toute explication je porte à votre connaissance un extrait du journal libération qui a retenu mon attention dont, une fois n'est pas coutume, je partage sur le fond l'édito signé par Laurent Joffrin :
Citation - [ …/...]
Quelques rappels factuels, toutefois. La montée géopolitique de l’islamisme n’a pas commencé en Irak mais en Iran, contre le chah, et en Afghanistan contre l’occupation russe avant de se propager dans l’Algérie de la guerre civile. Les États-Unis soutenaient le chah (musulman) avant de l’abandonner au profit de ses opposants (musulmans). Ils luttaient aussi, pour contrer l’URSS, aux côtés des insurgés afghans (musulmans, parmi lesquels un certain Ben Laden). La France, enfin, soutenait le gouvernement algérien (musulman) contre le Groupe islamique armé, le GIA (musulman).
La première guerre d’Irak a été menée par George Bush père pour venir au secours du Koweït (musulman). Il s’agissait de contrer l’agression de Saddam Hussein (musulman), qu’on pouvait difficilement laisser sans réponse, sauf à déstabiliser l’ensemble des pays du Golfe (musulmans) que les Occidentaux estimaient nécessaire de soutenir. La deuxième guerre d’Irak n’a pas été décidée sur un caprice, mais après l’attentat du 11 Septembre, fait essentiel à la compréhension des enchaînements, qu’Onfray s’abstient de rappeler pour qu’on ne voit en rien dans l’action américaine une quelconque réponse à l’agression. La guerre d’Irak, d’ailleurs, ne fut pas la première réplique au 11 Septembre. Elle a été précédée d’une intervention en Afghanistan, dont le régime intégriste abritait les terroristes d’Al-Qaeda (intervention menée avec une coalition de musulmans anti-talibans).
Au mépris des musulmans humanistes
La deuxième guerre d’Irak fut, à coup sûr, une tragique erreur fondée sur un mensonge d’État. Mais faire remonter l’affrontement avec l’islamisme à ce seul événement (dont la France s’est désolidarisée alors qu’elle est frappée aujourd’hui) est une simplification infantile. On peut contester toutes ces décisions, toutes ces guerres, bien sûr. Mais les présenter comme une simple agression de l’Occident contre l’islam est sommaire et faux. La plupart du temps, il y a des musulmans des deux côtés de la ligne d’affrontement. Manifestement, le philosophe qui «vit de réflexion» est incapable de penser cette complexité.
Du coup, il reprend de manière naïve et, au fond, dangereusement masochiste, le discours des intégristes, qui ne cessent de présenter leurs crimes comme une réponse à l’agression occidentale. Il fait de Daech – quel honneur ! – le cœur même de l’Oumma, conférant à cette phalange obscurantiste et terroriste le statut de représentant légitime de l’islam dans le monde ! Il avalise aussi bien la dénomination de «croisés» donnée aux Occidentaux par les intégristes. Il le fait au mépris des musulmans humanistes de tous les pays qui se battent courageusement contre l’intégrisme et le terrorisme, et qui sont dissous d’un mot par Onfray dans le concept religieux d’Oumma, base d’une «guerre des civilisations» entre un islam représenté par sa fraction obscurantiste et intégriste et une démocratie soudain réduite à sa composante occidentale (alors que le monde musulman est en partie démocratique : voir l’Indonésie, premier pays musulman du monde, ou bien la Tunisie).
Ridicule euphémisme
Avec cette phrase merveilleuse au passage, concession du philosophe à l’air du temps : «La civilisation islamique à laquelle renvoie l’Etat islamique est en effet puritaine.» Puritaine, c’est le mot ! Les intégristes assassins qui interdisent la musique, le sport, qui détruisent Palmyre, décapitent les récalcitrants et ramènent la femme au Moyen-Age sont effectivement un peu «puritains». C’est leur moindre défaut ; des Quakers un peu excessifs en quelque sorte ! Comme le dit Onfray un peu plus haut dans l’entretien : «Commençons par nommer les protagonistes correctement.»
Ce ridicule euphémisme a d’ailleurs une fonction dans le raisonnement. Diplomate imaginatif, Onfray propose d’ouvrir une négociation directe avec l’État islamique. Nous promettrions de ne plus intervenir contre lui en échange d’une mise en sommeil des réseaux terroristes en France. Reconnaître d’un coup Daech comme Etat légitime et proposer aux assassins de s’asseoir autour d’une table (avec ou sans kalachnikov ?), voilà en effet une proposition qui nous sortira de l’odieux «politiquement correct».
On a du mal à situer ces raisonnements abracadabrantesques, entre obsession de l’identité, qui assigne tout individu à son origine (musulmane en l’occurrence, donc «puritaine» à la Daech…) et affirmation de la culpabilité intrinsèque des démocraties occidentales. Une pensée (?) qui proclame à la fois la guerre des civilisations mais refuse toute action contre les intégristes, qui méprise la démocratie (matérialiste, médiatique, cynique, etc.) mais s’en réclame néanmoins, qui reprend dans un salmigondis obscur les thèses de l’extrême droite et de l’extrême gauche. Après cette mise au point, faudra-t-il perdre encore du temps à contredire un analyste aussi confus et inconséquent ? - Fin de l'extrait
Je ne tiens pas pour impossible que vous puissiez, dans quelques temps, raccorder plus harmoniquement et mélodiquement, dans l'esprit d'une sonate pour piano à quatre mains, l'aria apothéotique du philosophe avec l'air d'une langueur monotone de « l'analyste politique », que ce sera dans une impatiente attente, certes sans vous en prier car dans ma bouche ce ne serait rien de plus qu'un heureux blasphème, néanmoins pour toute fin à cette lettre, sans la moindre hésitation, je me contenterai de saluer en vous seulement le philosophe – il faut bien par la force de la nature prendre à César ou à dieu ce qui est entièrement dû à Onfray - bien à vous, Crab – 23 Novembre 2015
Suites :
http://laicite-moderne.blogspot.fr/2015/11/gens-du-livre-et-gens-des-livres.html
ou sur :
http://laiciteetsociete.hautetfort.com/archive/2015/11/22/gens-du-livre-et-gens-des-livres-5720175.html


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La poésie dit l'essentiel avant que la philosophie ne s'en mêle, et dans toute l'histoire de la vie spirituelle de l'humanité il n'y a jamais qu'un seul créateur, le poète, ainsi qu’un unique miracle, la musique.
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Athée libertaire et non athée chrétien, amoureux des arts et plus particulièrement de l'Opéra.
Prioritairement engagé pour combattre l'antisémitisme et participer au débat public afin de réunir les conditions d'un changement ouvrant la voie à une démocratie avancée. En remplaçant le système politique actuel jacobin ou monarchique par une république girondine.
Claude Bouvard

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